
Nous nous sommes retrouvés autour des galettes, au dernier étage de l’immeuble de la rue Chapon, on a parlé du Brésil, des archives, on a fumé une cigarette à la fenêtre, on voyait la vie d’en face, en partant MP nous signale le 1bis rue Chapon, adresse fictive.
Bourrasques, averses, je renonce au vélo, cours vers la station de métro Richard Lenoir, m’aperçois que la grande tente a retrouvé sa place sur le boulevard, l’expulsion était provisoire, ça m’allège.


Les deux gants de L tricotés mains par sa mère, le même modèle mais avec une variation de couleur. Elle en a perdu un, elle complète sa paire avec celui de sa sœur disparue, leurs mains réunies m’émeuvent.
Derrière la vitrine je reconnais la boîte en cuir ronde, noir et rouge, ornée de motifs dorés, je crois qu’elle est d’origine kabyle, elle était chez ma mère quand nous étions enfants. Je pensais qu’elle avait disparu il y a bien longtemps. À l’intérieur une vingtaine de photos d’identité d’A, à différentes époques de sa vie, d’où tu tiens ça, elle me les a données, un leg étrange, qu’elle m’autorise à emprunter.


Elle regarde la gravure, tente de comprendre, j’ai justement la plaque de cuivre, je retire le papier qui la protège, le grain du métal rongé par l’acide se révèle sous la lumière. J’explique la résine, les bains, l’eau forte, mime les gestes pour imprimer, cette fragile transmission m’exalte.

Elle avait voulu quitter Grisgione parce que vivre face à la mer la rendait morose, pas question alors d’y disperser ses cendres. Maintenant je regarde autrement la décision qu’elle a prise, revenir, renouer avec un lieu chargé de souvenirs, l’enfance, le village, ses frères et sœurs, les étés passés avec mon père, elle ne pouvait pas les avoir totalement oubliés.
Sous la pluie fine j’explore un territoire restreint, être attentive aux indices, aux reflets, aux silhouettes qui se précisent contre la vitre opacifiée. Dans ces espaces et explorations contraintes, je ne photographie pas de la même manière. J’entends le retour aux normales saisonnières, tout n’est pas perdu.

il y a un livre d’Éric Hazan titré « L’invention de Paris » (et surtout sous-titré) (dans les miroirs des flaques on reconnaît son reflet) – et pour les gants c’est juste et simple ( et tellement magnifique)
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ah merci je vais demander à mon bibliothécaire préféré, mercredi je te parlerais de L, et merci encore
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c’est un grand territoire restreint
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des espaces qui s’ouvrent ♡
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La dernière photo en N et B évoque une eau-forte, troublant et beau. Ton carnet fait toujours mouche, dans son écriture en mots et en images, il me semble qu’il révèle l’infime dentelle qui double les apparences, le temps qui passe, tu en pointes en trouées délicates.
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oui, le passage au noir et blanc en a révélé le grain, en réalités poussières sur vitre opacifiée… merci Bruno, ce journal m’est devenu indispensable
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sans tout comprendre, lire avec émotion (et pas uniquement à cause des deux gants), avec émotions variées en fait et prendre le tout comme un cadeau
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cette rencontre avec L est un cadeau, vous seriez sans doute un peu copines
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🙂
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