
sortir, il y aura toujours quelque chose à saisir dans la ville, le même pont, les mêmes quais, autrement, forcer le regard, se réjouir de l’installation de Paris Plages, forcément du nouveau, de l’insolite à photographier, les installations désertées, le ciel voilé, les enfants sous la brume artificielle, il ne fait même pas chaud, un début de spleen

le temps maussade, l’isolement, pas de promenades en vue, rien n’accroche le regard, je finirais par photographier le jardin enfermé par des champs de maïs, N me confie qu’elle n’aime pas trop le maïs, ça l’oppresse, et ce bruit quand le vent passe au travers, me suis souvenue comme déjà elle sursautait aux cliquetis des filins métalliques sur les mâts, en rentrant à pied — la nuit — d’une soirée à Jullou, nos petites frayeurs adolescentes
regarder les étoiles avec M, rire de nos lacunes astronomiques, fumer une cigarette roulée, s’étonner de sa curiosité sur le projet entamé sur mon père, sentir le froid, savourer l’inédit


gare hors monde, dans un cul de sac, au bout du quai le terrain vague, le chemin de côté qui attire, l’échappée d’un temps trop minuté, à l’arrivée Gare de Lyon le sac de couchage dans le panier du vélib abandonné par le propriétaire trop pressé de prendre son train, l’attendre devant la gare, sept minutes… après je pars, le voir surgir en courant, se réjouir d’avoir été prévenante
la joie du départ, la perspective d’avoir du temps pour lire, pour écrire, se moquer avec A du sale type qui voulait qu’on le suive à Concarneau, la côte, par cœur, décider que le nouveau propriétaire de Capharnaüm ne la mérite pas, il a d’ailleurs retiré la plaque, reste la beauté du pin en contrejour


juste après le couchant, un ciel irréel, un de ces ciels qui m’effrayaient un peu enfant, j’imaginais que c’était à ça que la fin du monde ressemblerait, étrange et spectaculaire, un ciel flamboyant, c’est comme le reflet des mégafeux, ce qui m’effraie aujourd’hui c’est qu’on doive inventer de tels mots