
Je fais des bouts de listes, rassemble mes affaires, j’avais oublié comme je détestais les départs, ça faisait trop longtemps.
Retrouvailles avec Laure et Jean-Luc à La caravelle, un des seuls bar que je connaisse à Marseille, j’aime sa situation en étage à l’écart des touristes du Vieux-Port, la silhouette de la Bonne Mère dans l’encadrement de la fenêtre. Nos livres côte à côte, les échanges faciles, les partages.

Déjeuner avec les amis de La Marelle, ma difficulté de parler de Comanche, prendre rendez vous avec la ville en août. À bord du Pascal Paoli, l’inédit d’une cabine pour deux, le drap blanc et lisse, me reviennent lointaines des sensations d’une même traversée. Au petit matin les hauts parleurs diffusent un chant corse, j’étais en train de m’habiller pour me jeter sur le pont, les côtes sont déjà là, mon cœur grossit.
Sous nos fenêtres, derrière les volets clos, j’entends régulièrement des conversations en corse qui me transportent au village maternel, je vois les yeux brillants de celle qu’on appelait tata Fée, le verger, la cuisine sombre, le papier journal étalé sur les tomettes pendant la cuisson des beignets, tout ça est définitivement perdu.


Je ne suis pas tout à fait prisonnière, le maître des lieux est joueur, je sais que je l’ai rencontré dans le passé, il m’explique que pour sortir de la maison il faut en creuser les murs, ses mains se mettent à pétrir leur surface, le crépi rose s’amollit sous ses doigts, dessous comme une glaise fraîche et le dehors apparaît. Ici je reprends mes bonnes habitudes et me lève aux aurores.
Christine Jeanney dans La Nuit de Rachel Cooper, « Si je faisais le parallèle avec mon travail, ça me donnerait un texte qui ne serait ni un essai, ni romanesque, ni un récit, ni poétique, ni documentaire, mais un peu tout ça à la fois, en petites quantités. Sans doute ce qu’on appelle un texte « hybride », ce qui est une autre façon de dire « bourde », mais élégamment. », hybride c’est le mot qu’a utilisé mon amie correctrice pour parler de Comanche, je ne pense pas qu’elle y voyait une bourde, mais c’est peut-être ce qui empêchait le texte d’accéder à un éditeur traditionnel.


On descend à Bastia, sur le marché il y a des frappes, certaines en attente de cuisson, leur forme plus travaillée que celles confectionnées par ma grand-mère, nous en achetons, nous traversons le pontetto avec le goût de citron et de beurre mêlés, les grains de sucre semoule fondent sous ma langue, apparaissent la silhouette ronde de Pauline, mais aussi celle de ma mère et de sa sœur, le pétrissage, le cérémonial de la découpe, l’odeur d’huile chaude.

hybride et bourde… il fallait y penser. Et voilà que je ne cesse plus d’y penser. Et aussi la difficulté de partir, on ne l’avoue pas si souvent, c’est bien de le lire.
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je me souviens de ton article fort là-dessus, la difficulté de partir, je crois même que c’est de là que j’ai osé le dire
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Retour à l’envoyeur … drôle !
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J’ai beaucoup aimé « La nuit de Rachel Cooper », lu grâce à toi !
Mais pour moi « Comanche » n’est pas hybride, il est « un », homogène, c’est plutôt un puzzle qui s’assemble petit à petit.
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merci Anne, oui l’image du puzzle qui s’assemble est juste, mais hybride vient peut-être interroger le genre seulement, roman, récit, enquête ?
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Le genre… « Récit intime et pudique », pour moi !
(je n’aime pas « hybride » parce que ça me fait penser aux voitures😅)
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oh cel « il m’explique que pour sortir de la maison il faut en creuser les murs, ses mains se mettent à pétrir leur surface, le crépi rose s’amollit sous ses doigts »… les photos (le ciel qui se meurt dans la chaleur au dessus de la pointe, le nuage etc… et ma découverte de l’existence de choses nommées frappes (peut petre aimerais-je, avec l’âge je commence à apprécier et même beaucoup les pâtes à gâteau diverses (enfin pas trop le feuilleté, aime pas le beurre)
un peu de vacance ce matin au pays natal que ne connais pas vraiment
et le plaisir de penser en même temps à vous et Christine
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Chère Brigitte, ici je t’imagine en train de faire tes premiers pas, quand aux frappes on est loin du feuilleté, c’est assez rustique, et plutôt beignet.
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