
N appelle joyeuse, nous annonce qu’elle part jardiner près de Catane, quinze jours en septembre avant la reprise à Arson, on se prend à rêver de voyages.
Nous fêtons l’anniversaire d’A, s’attendrir devant la photo exhumée par ses grands parents, elle a sept ans au bord du lac d’Éguzon où elle a appris à nager, nous lui offrons le journal de Virginia Woolf trouvé en occase, puisqu’en rupture chez l’éditeur.


Trois ans après la première fois remonter à bord du Thalys, je lis Hauts Déserts de Michèle Dujardin, d’une traite, magnifique. Repérage du zèbre dans la salle des pas perdus pour le rendez vous de demain avec les amis du Tiers livre. En avance pour le train de Braine, minuscule exploration autour de la gare du midi. Arrivée à Lasne, Clo manque, mais je retrouve la magie de l’ouverture des boites, cette fois on me donne les lettres, les photographies, glissement de l’émotion, désormais c’est moi qui raconte les détails. Marche dans la Brabant, découverte d’un chemin creux — tel celui d’Ohain décrit par Hugo.


Réveil dans la chambre de Clo, toujours ces même sensations de matins dépaysés, ces rituels auxquels on s’adapte. Avant de rejoindre D et P, regard à la hâte sur la pile posée sur la commode, incrédule. Matinée en quête d’une série de photos dont je crois me souvenir, D s’inquiète de pas les retrouver, je finis par lui dire que je les aies peut-être imaginées. Elle me propose de prendre un bijou, un tableau, celui là tu as l’air de l’aimer beaucoup, non vraiment, et puis je l’ai photographié, tu le prendras la prochaine fois ? Visite de l’abbaye de Villers après avoir déposé au bord d’un champs de maïs les minuscules souriceaux trouvés dans un tiroir, on essaie d’en rire, mais on a quelques inquiétude sur leur sort. Abbaye splendide, mais au cœur de la nef en ruine me battre avec l’appareil photo, je ne sais jamais comment photographier l’architecture, m’accroche aux détails.


Après le dîner, la marche rapide avec D et P, le dégradé du crépuscule, quelques maisons cossues, passage d’une moto folle, à la merci de, je ne reconnais rien, ne comprends pas le déplacement que nous venons de faire, me prend d’avoir peur.
Étreinte avec ma cousine sur le quai de Braine l’Alleud, promesses encore, à la gare du Midi retrouver tout près du zèbre CK et VT du groupe d’écriture du Tiers livre. Discussion à bâtons rompus, le temps d’écrire, raconter une histoire, les lieux, Perec, l’Iliade, l’oralité, l’intimité, le souffle et la langue, Laura Vazquez, les gosettes, les légendes photographiques, Vincent nous présente son carnet, immense, me viens cette expression, prends en de la graine, le temps glisse. Dans le train retour j’amorce le texte sur l’objet auquel je pensais renoncer avant cette rencontre.

Nuit agitée, cœur étroit pour tout ce qui surgit, et ce questionnement sans fin sur le Comanche, un récit ou un objet testimonial ? Des phrases toutes faites se heurtent, laisse venir, un jour ce sera évident, ça s’imposera, là tu y es, y a matière à, toutes ces photos elles ont leur place, tu devrais en faire quelque chose, lâche prise, au fond tu sais… je m’accroche aux signes, ou je les invente, sans doute que je ne veux pas finir, et ce nouveau projet de l’atelier d’été, un prologue ? Je repense aux rituels d’écriture évoqués par Vincent, si je veux finir l’un ou l’autre il va falloir faire mieux que le temps volé.
Publication sur le blog du Tiers Livre du texte autour de l’objet, une main de porcelaine, un texte sur l’absence plutôt, troublée par les réactions du groupe, aussi par ces croisements avec le réel, couchée sur la table, les aiguilles plantées entre les doigts, les yeux fermés (je n’osais pas regarder). Trajet retour grisant de Concorde à Bastille en vélo, première fois que se déroulait cette immense perspective, retrouver un peu d’amour pour Paris, à cet instant.

je rêve d’un semblable journal
(et j’ai commencé à rêver en lisant Catane, avant de suivre… rêve un peu de tout, sourire à l’experte en photos, rêve de la rencontre parisienne juste le temps de penser que me serais liquéfiée)
admiration pour la façon dont cela est mené, dépouillé dans le forme, intelligent et sensuel
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