
Déjeuner de fête au Train bleu. Nous sommes placés au pied d’une fresque représentant le Vieux port de Marseille. Luxe un peu bruyant. Dans ces moments où je me sens déplacée, il y a la présence de ma grand-mère, de mes tantes, je les rassure, je n’oublie pas d’où je viens, dans le décor gigantesque la gêne se dilue.
Une sollicitude sincère qui trouble. On cherche des mots, on rassure l’interlocuteur, on invoque un manque de sommeil, une rêverie. C’était sans doute ça d’ailleurs. Mais son malaise, comme s’il mesurait être entré dans une zone trop intime l’oblige à parler encore, c’est ton regard, cette absence. C’était comme s’il me tendait un miroir et que je ne pouvais pas échapper à mon reflet.


La semaine délirante. Des tempêtes, des feux, des puissants, des gestes inouis, des injures. La miniature absorbe heureusement les angoisses, mais sans doute trop d’énergie. J’approche de la fin, même s’il y a mille détails à finir. Heureusement la deadline ne pourra pas être repoussée, il est temps de revenir aux choses sérieuses. Écrire ?
Nous nous retrouvons chez Catherine avec plusieurs amis du Tiers Livre, échanges un peu vifs, impatients, nos désirs d’écriture, nos inquiétudes, nos manquements. Xavier me suggère que quand même l’Algérie, on devrait y penser, ce voyage on devrait le faire. Je m’abrite derrière les tensions entre les deux pays, un peu de peur. C’est au-delà de la peur, je ne sais même plus si j’ai envie de faire ce voyage. Il faudrait qu’on m’y invite vraiment.

C’est la proposition la plus enthousiasmante que l’on m’ait faite depuis des mois. Je ne sais pas si ça aboutira. J’ai sorti les cyanotypes du carton à dessin où ils dormaient depuis octobre. Curieusement nous ne retrouvons pas l’image qu’elle a choisi pour la couverture de son livre. J’aime sa manière prudente d’avancer des idées, j’aime le dialogue à venir. Quand je prends une photographie je ne cherche pas à fabriquer une « belle » image. Je sais qu’il y a toujours un prolongement, une révélation, surtout au moment de la publication. La photographie ne m’aide pas à comprendre le monde, mais elle m’y relie.
Échanges avec Anh Mat. Comme mes doigts sont douloureux j’utilise la messagerie vocale, il me répond et sa voix familère, découverte à travers son journal, me donne le sentiment d’une grande proximité, sentiment que j’ai très rarement au téléphone que je n’aime pas trop utiliser. Peut-être que c’est le décalage de l’enregistrement du message, l’attention portée aux mots que nous prononçons.

